Statue de la Liberté dans le film "La planète des singes"

Lutter pour nos libertés démocratiques

Liberté ? Ce mot universellement révéré est habillé de tellement de connotations mythiques exaltées ou à l’inverse de prétextes cyniques qu’il n’a plus de sens commun dans notre quotidien de pays malgré tout démocratiques. Donnons lui donc un sens prosaïque et pragmatique :

“La liberté d’un individu se mesure à la quantité de possibilités dont il dispose.”

C’est peut être là une idée iconoclaste mais « démocratie » peut ne pas être synonyme de « liberté ».

La clé de la problématique est que 1) tous les citoyens ne veulent pas la même chose sur tout et que 2) les ressources sont limitées ou les volontés contradictoires. Des choix sont donc à faire, ce qui, en démocratie, se fait généralement par votes majoritaires.
Chacun de ces votes aura pour effet de donner des possibilités supplémentaires à une partie des citoyens et d’en retirer à l’autre. Sur chaque vote une partie des citoyens voit donc sa liberté augmenter, et l’autre partie la voit diminuer.
Même si cela touche des domaines différents à chaque fois, cela peut avoir un effet cumulatif : une augmentation des possibilités c’est une augmentation de pouvoir permettant d’emporter d’autres décisions. Dans ce cas le fonctionnement démocratique majoritaire se traduira à terme par une diminution des possibilités, donc des libertés, pour une partie des citoyens, ceux qui seront le plus souvent minoritaires au fil des votes.

Voici un exemple, à peine fictif, pour illustrer ce qui précède.
Une partie des habitants d’une commune, amateurs d’activités physiques, veut l’installation d’un complexe sportif. L’autre partie, plus intéressée par les activités culturelles veut la construction d’une médiathèque. Un référendum est organisé. La partie gagnante verra son nombre de possibilités et donc sa liberté augmenter dans la pratique de ses activités favorites.
Elle verra également son pouvoir augmenter : la victoire puis la pratique d’activités communes va souder le groupe qui va se lier, au delà même des intérêts individuels, pour d’autres décisions, voire remporter des élections municipales. C’est ce que les sociologues, après Bourdieu, appellent le capital social et que le grand public sous-entend par « avoir des relations« .
L’exemple est volontairement anodin pour rester simple. Mais on imagine l’effet produit sur plusieurs décennies par des arbitrages budgétaires inégaux conduits par des majorités gouvernementales.

Doisneau - l'enfant sage
Minoritaire à la récré.
Photo Doisneau

Une démocratie qui se voudrait égalitaire se devrait donc d’apporter des compensations : compenser par d’autres possibilités les possibilités enlevées.

C’est pourquoi dans une démocratie égalitaire une majorité ne peut pas imposer toute sa volonté à une minorité sous peine de détruire à terme l’équilibre. Une majorité ne pourra imposer que des compromis acceptables donnant lieu à échange de possibilités compensatoires (comme par exemple un surplus de sécurité, celle-ci étant en soi constitutive de possibilités.) Cela veut dire que toute décision doit être précédée de négociations. D’où l’intérêt des corps intermédiaires.
La démocratie directe type référendaire n’est, du point de vue égalitaire, pas la plus efficace (sauf si les consultations se limitent à mettre des sujets sur la table des négociations.)

De ce qui précède on voit la relation étroite entre liberté et égalité alors qu’il est habituel d’opposer ces deux valeurs. C’est ne considérer qu’un côté de la balance. Or la liberté-pouvoir de l’individu sur un plateau est équilibrée par la liberté-contre-pouvoir d’autrui sur l’autre plateau. Toute rupture d’égalité entraîne une diminution de liberté pour l’un ou pour l’autre.
L’égalité que souvent on restreint cyniquement à l’identité de traitement devant la loi peut aussi plus largement se comprendre comme l’égalité de libertés, donc de possibilités.

Étymologiquement, « démocratie » désigne l’exercice du pouvoir par tous les citoyens, le plus souvent à travers leurs représentants. Mais qui dit pouvoir dit obligatoirement contre-pouvoir (c’est physiquement obligatoire sinon tout s’écroulerait comme si vous vous appuieriez sur du vide). Et la liberté de chacun se construit effectivement dans ce jeu de pouvoir contre-pouvoir entre les volontés divergentes des citoyens.

Mêlée de rugby
Combat pour ouvrir des possibilités

Votre commentaire

Entrez vos coordonnées ci-dessous ou cliquez sur une icône pour vous connecter:

Logo WordPress.com

Vous commentez à l’aide de votre compte WordPress.com. Déconnexion /  Changer )

Photo Facebook

Vous commentez à l’aide de votre compte Facebook. Déconnexion /  Changer )

Connexion à %s

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur la façon dont les données de vos commentaires sont traitées.